Je suis libre
Alors il faudrait que je choisisse mon camp ? Oh là !
Allez-y doucement.
On n'est pas à Moscou en 1936.
On n'est pas à Cuba
On n'est pas en Corée du nord.
On n'est pas à Téhéran.
Je suis libre, m'entendez-vous ?
Libre
De dire tout le mal que je pense de cette armée
Des ombres qui, dénuées qu'elles sont de toute idée
Insolite, au garde-à-vous, l'œil noir, affublées
De l'uniforme vous jettent : il faut choisir son camp.
Il s'agit bien sûr du leur, le cantonnement
De la bêtise humaine, le camp des mal-pensants
De la sottise unique, camp pour moi de l'ennui,
Et du malheur, camp des yeux fermés, de l'oubli,
Camp des camps. Rengagés désoccupés, depuis
Cent cinquante ans qu'ils promettent le Grand Soir,
Les millions des millions n'en ont vu que le noir.
Ces soldats, combattants fatigués d'un autre âge
Harassent encore le pauvre monde et leur adage :
« dans la rue tous ensemble » qu'ils récitent partout
En tapinois s'entend « dans la rue derrière nous »,
Se prennent pour l'avant-garde et annoncent des jours sombres,
Séduisent tout ce qui passe, empilent dans leur carnier
Hamas, intégristes et voyous encagoulés.
Nostalgique du parti, la triste armée des ombres
Au réveil difficile. Elle a bougé un pied,
Ouvert un œil. A son chevet ils sont en nombre.
Prends garde à toi, oh ! mon frère
Qu'elle ne s'en prenne
à ce qui nous est le plus cher :
la liberté.
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